La Belgique en tant que leader surprise : usines d’IA en construction

usine d'IA belgique

Ne qualifiez pas la Belgique de retardataire dans l’adoption de l’IA. Les atouts sont présents pour devenir un pionnier en Europe. Les usines d’IA peuvent jouer un rôle majeur dans ce processus.

« Nous avons peut-être la réputation d’être des suiveurs, mais quand on regarde les chiffres, nous ne nous en sortons pas si mal », déclare d’emblée Koen Segers, Directeur Général de Dell en Belgique. La modestie belge s’avère déplacée en matière d’adoption de l’IA.

Le SPF Économie a récemment publié un rapport montrant que la Belgique est un leader européen en matière d’utilisation de l’IA par les entreprises. 24 % des entreprises belges utilisent aujourd’hui « au moins une forme d’intelligence artificielle ». Cette position sur le podium est confirmée par Eurostat : seuls le Danemark (27 %) et la Suède (25 %) obtiennent de meilleurs scores.

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« Les organisations tant privées que publiques évoluent rapidement. Nous entrons maintenant dans la phase de ‘l’IA d’entreprise’ où les entreprises l’utilisent pour des scénarios professionnels. Pour de nombreuses organisations, cela a commencé par des cas d’usage typiques, comme l’utilisation de Copilot pour la productivité personnelle, mais cela s’étend rapidement à des implémentations très spécifiques à l’entreprise ».

Grand ou petit

Selon Segers, la prétendue position d’outsider de la Belgique découle notamment du fait que nous ne disposons pas (encore) de centres de données IA à grande échelle. « Mais ce n’est pas du tout nécessaire. Une idée fausse se développe selon laquelle l’IA nécessite par définition des investissements dans des “fermes de serveurs” massives. Les cas d’usage peuvent tout aussi bien être à petite échelle et fonctionner sur votre ordinateur portable ».

En pratique, cependant, tout n’est pas si simple. Gartner prédit que quarante pour cent des projets d’IA seront abandonnés d’ici deux ans par manque de rentabilité. De nombreuses solutions vendues sous le terme tendance d’agents IA sont en réalité d’anciens produits qui n’apportent pas grand-chose de nouveau.

« La bonne solution commence par l’usage », affirme Segers, enfonçant un clou bien connu. « Les entreprises peuvent réussir en expérimentant, mais si le cas d’usage n’est pas suffisamment défini, cela ne fonctionnera pas en pratique. Ensuite, il faut examiner si vos données sont accessibles. Dans de nombreuses organisations, les données sont dispersées. Une gestion minutieuse des données est donc très importante ».

« Un troisième facteur où les entreprises échouent souvent sont les compétences. Dans une enquête mondiale menée par Dell, presque cent pour cent des entreprises indiquent avoir besoin de compétences supplémentaires. L’infrastructure ne doit pas être votre première préoccupation, le fournisseur s’en occupe », selon Segers.

Retour au on-prem

Aujourd’hui, une quatrième préoccupation s’y ajoute. « La souveraineté est à l’ordre du jour de chaque DSI », affirme Segers sans hésitation. « Cela s’accélère avec l’IA car on veut utiliser des données confidentielles. Il y a une demande croissante de solutions on-prem sur le marché ».

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La tendance selon laquelle les jours du « cloud-first » sont progressivement comptés n’est pas seulement confirmée par Dell, mais un fabricant de serveurs voit cela d’un bon œil. « Le cloud public est à nouveau mis “en attente” au profit des centres de données propres ou d’une infrastructure cloud privée. Les preuves de concept autour de l’IA commencent souvent dans le cloud public, mais pour l’implémentation réelle, on revient souvent au on-prem. C’est là que se trouve finalement la majorité des données d’entreprise ».

Dell peut habilement capitaliser sur cela. « L’infrastructure que le client achète chez nous appartient au client. Les données restent par définition sa propriété. Nous pensons que l’IA doit venir aux données, et non l’inverse ».

Usines d’IA belges

Le tapis rouge est déroulé pour les AI factories. En tant que partenaire fidèle de Nvidia, Dell (pas le seul fabricant de serveurs) participe avec enthousiasme aux plans de construction de Jensen Huang. Mais que devons-nous imaginer exactement par une « usine d’IA » ? Nous posons la question à Segers.

« Il faut le voir comme une couche d’infrastructure qui relie un projet au modèle d’IA approprié. Les données sont la matière première que vous introduisez dans l’usine et la sortie est le résultat d’un cas d’usage. Les usines d’IA sont à tort réduites aux GPU, car c’est un écosystème ouvert avec plusieurs maillons. La demande de serveurs traditionnels n’augmente pas significativement, mais nous voyons une traction accrue pour les accélérateurs ».

Les terrains constructibles sont plutôt rares en Belgique et cela risque de ne pas être différent pour les usines d’IA. « Les investissements dans les centres de données peuvent fournir la capacité nécessaire. Dans ce contexte, je ne peux qu’applaudir l’initiative du gouvernement d’attirer des usines d’IA en Belgique. Cela renforcera la position de la Belgique pour attirer les grands acteurs internationaux et augmenter le volume d’adoption par les entreprises belges ».

Enjeux élevés

Pour les organisations qui souhaitent construire une usine d’IA, Dell est impatient d’être l’entrepreneur. « Dell a fait de l’IA son grand pari. Notre focus est sur la couche d’infrastructure et nous laissons ensuite le choix de la direction à prendre. L’IA doit être abordée depuis un écosystème ouvert, sinon on se retrouve rapidement bloqué », conclut Segers.

C’est une idée fausse que l’IA nécessite des « fermes de serveurs » massives. Ce n’est pas du tout nécessaire.

Koen Segers, Directeur Général de Dell Belgique