L’UE vend du vent avec sa stratégie de souveraineté numérique

Souveraineté numérique de l'UE

La Commission européenne dévoile une nouvelle stratégie numérique visant à réduire la dépendance à l’égard de la technologie américaine. Sur le papier, le plan contient de belles promesses, mais peu concrètes.

L’Union européenne se trouve aujourd’hui dans une position technologique amère. La dépendance vis-à-vis des technologies étrangères, principalement américaines, préoccupe les politiques. « L’Europe doit urgemment réfléchir à sa dépendance stratégique envers quelques acteurs technologiques », avons-nous entendu récemment le ministre-président flamand Matthias Diependaele (N-VA) déclarer lors de Cybersec.

Cette préoccupation est maintenant traduite en (un début d’) action par la Commission européenne. Elle présente une nouvelle Stratégie Numérique Internationale pour stimuler ‘la coopération mondiale autour de la technologie numérique, de la cybersécurité et de l’intelligence artificielle’. Dans ce document de 15 pages, la Commission excelle dans ce que les politiciens font de mieux : dire peu avec beaucoup de mots.

Amis numériques

Le plan met en avant trois objectifs, tels qu’énumérés dans le communiqué de presse :

  • Accroître la compétitivité de l’UE dans le domaine technologique par la coopération économique et la collaboration entre entreprises.
  • Promouvoir un niveau élevé de sécurité pour l’UE et ses partenaires.
  • Façonner la gouvernance et les normes numériques mondiales avec un réseau de partenaires.

La coopération internationale est constamment soulignée. En ces temps d’incertitude géopolitique, l’UE veut savoir qui sont ses amis numériques et qui pourrait le devenir. Pendant longtemps, c’était les États-Unis, mais la relation s’est détériorée depuis que Trump a occupé le Bureau Ovale. Le fait que les grandes entreprises technologiques américaines dominent l’industrie informatique européenne ne semble pas intéressant à long terme, même si les hyperscalers tentent d’apaiser avec des services cloud souverains.

La Commission européenne ouvre son écosystème numérique aux partenaires « partageant les mêmes idées », déclare la commissaire européenne Henna Virkkunen. Cela peut être les États-Unis, mais pas nécessairement. Des amitiés numériques sont également recherchées avec des pays comme le Japon, la Corée du Sud, Singapour et le Canada. La Chine n’est pas mentionnée comme partenaire potentiel.

Pour faire fleurir ces amitiés numériques, l’UE semble prête à faire des concessions sur les deux autres piliers : la sécurité et la gouvernance. L’Union européenne est connue pour sa réglementation stricte, ce qui provoque parfois des frictions avec d’autres pays, les États-Unis en tête. Des voix s’élèvent au sein des institutions européennes pour réviser la loi RGPD et pour restreindre le chiffrement.

Beaucoup de plans, peu d’actions et peu d’argent

Il ne manque en tout cas pas d’initiatives pour renforcer la position numérique de l’Europe. En avril, un plan pour l’IA a été annoncé et la technologie quantique et la 6G sont également en haut de l’agenda, en plus des initiatives déjà en cours comme le Chips Act. Le même problème se pose souvent : beaucoup de paroles, mais peu d’actions et trop peu d’argent pour faire la différence. La Commission européenne doute d’ailleurs elle-même que la région puisse se détacher de la technologie américaine.

Cette analyse est également faite par le développeur de logiciels et entrepreneur néerlandais Bert Hubert pour The Register. « Ce plan indique qu’ils n’ont pour l’instant rien de substantiel à dire. C’est triste, car en ce moment quelque chose de concret serait très bienvenu. Ne rien publier aurait été préférable à ceci ».